Prends-moi pas pour une valise !

Si les francophones de l’extérieur du Canada ignorent le sens du titre « Les gras dur d’Air Canada nous prennent pour des valises », les Québécois le saisissent immédiatement.

Au Québec, être gras dur, c’est avoir de la chance, être avantagé. On peut se dire gras dur pour admettre qu’on a de la chance, comme on peut trouver qu’untel est gras dur parce qu’il abuse de sa position avantageuse.

Les gras dur dont parle l’article cité plus haut sont les dirigeants d’Air Canada : des gens riches et insensibles à la réalité sociale. Cette expression s’accompagne donc souvent d’une connotation négative, car elle sous-entend que la personne privilégiée ne mérite pas les avantages dont elle profite abondamment.

L’expression peut servir de critique sociale face aux inégalités, car non seulement le gras dur est fortuné, mais il a aussi tendance à croire que sa richesse le rend supérieur aux autres.

On peut employer l’expression gras dur comme adjectif qualificatif (« ils sont gras dur ») ou comme nom (« ce sont des gras dur »).

Exemples :

— Les boss sont gras dur et ils ne le savent même pas. Ils se sont voté une augmentation sous prétexte qu’ils ont travaillé fort pour décider qui ils allaient congédier. Ils trouvent quand même le moyen de se plaindre.

— Jules a hérité d’une chaîne de dix boulangeries. Il est gras dur.

— Ils ont fait rénover leur chalet (maison de campagne) pendant qu’ils voyageaient en Europe. Ils sont vraiment gras dur ces deux-là.

— Depuis que j’ai gagné à la loto, je suis gras dur !

L’expression française être né avec une cuillère en argent dans la bouche désigne quelqu’un qui a eu la chance de naître dans une famille aisée. Être comme un coq en pâte signifie « avoir une vie confortable, être à l’abri du besoin et des soucis ». Ces deux expressions peuvent se comparer à gras dur, toutefois, gras dur dégage souvent une note plus abrasive, plus insultante.

Se faire prendre pour une valise

Quant à l’expression se faire prendre pour une valise, elle évoque une situation où une personne est perçue comme naïve, ignorante ou facilement manipulable.

Cette expression très courante au Québec repose sur une métaphore simple : une valise est un objet passif que l’on transporte sans qu’elle ait son mot à dire. Être pris pour une valise, c’est donc être traité comme un simple objet que l’on manipule sans considération et que l’on remplit impunément d’informations fausses.

Exemples :

— Un de mes étudiants a essayé de me convaincre que son chien avait mangé son devoir. Il me prend vraiment pour une valise.

— Je sais bien que tu me caches quelque chose. Allez, dis-moi la vérité, et ne me prends pas pour une valise.

— Les politiciens nous prennent souvent pour des valises avec leurs promesses irréalistes.

— Les compagnies d’aviation nous prennent vraiment pour des valises avec toutes les surcharges cachées.

Une expression québécoise apparentée à se faire prendre pour une valise est avoir une poignée dans le dos, qui signifie « que l’on manipule facilement », comme si la personne portait une poignée qui permettrait aux autres de la traîner à leur guise dans n’importe quelle direction.

Partagez cet article!

Inscription à l’infolettre

Inscrivez-vous à notre infolettre (newsletter) pour recevoir les nouveaux articles publiés sur Traduction du français au français.

Je m’inscris

Nous utilisons votre adresse courriel uniquement pour vous envoyer l’infolettre. Vous pouvez vous désinscrire à tout moment.