Peinturer, un sens bien québécois
Les Québécois ont donné à peinturer le sens de « couvrir de peinture ». Son usage est très courant au Québec.
Le verbe peinturer nous permet donc de faire la distinction entre l’utilisation utilitaire ou artistique de la peinture : nous peinturons un mur ou un objet et nous peignons un tableau. Une nuance inconnue en Europe.
Exemples :
— En fin de semaine, je dois finir de peinturer le chalet (maison de campagne).
— Ma blonde (copine, amoureuse) aime faire des rénovations. Il faut toujours qu’elle trouve une pièce à peinturer.
— Depuis sa construction, la tour Eiffel a été repeinturée 20 fois. Il faut plus de 60 tonnes de peinture chaque fois.
Se peinturer dans le coin
Cette expression est une traduction de l’anglais « to paint oneself in a corner ». C’est une allusion à une personne qui peinture un plancher et qui termine le travail dans un coin sans porte. Elle ne peut plus sortir de la pièce sans marcher sur la peinture fraîche.
Se peinturer dans le coin signifie donc « se placer soi-même dans le pétrin, se faire prendre à son propre jeu, être acculé au pied du mur par sa propre faute ».
Exemples :
— Ça n’a aucun sens, Jules s’est vanté de son méfait devant les caméras. Un vrai petit coq! Il s’est vraiment peinturé dans le coin.
— Julie s’est peinturée dans le coin en mariant Jules pour son argent sans d’abord vérifier l’état véritable de ses finances.
Nous pouvons aussi peinturer une autre personne dans le coin. Dans ce cas, nous tentons de coincer cette personne, de l’attirer dans un traquenard, de la piéger, de l’acculer au mur.
Marcher sur la peinture
Marcher sur la peinture n’est pas à proprement parler une expression, même si on l’entend souvent. Nous l’utilisons pour expliquer que, parfois, il n’y a pas d’autre solution que de se ridiculiser pour se sortir du pétrin.
C’est l’ancien premier ministre du Canada Jean Chrétien qui semble avoir créé cette expression après qu’un journaliste lui a demandé ce qu’il ferait s’il était peinturé dans le coin. Il avait répondu : « Si on s’est peinturé dans le coin, on marchera sur la peinture. »
Cette étonnante réponse de la part d’un premier ministre a été depuis reprise par de nombreux commentateurs politiques pour décrire un politicien qui renie ses promesses, qui vire son capot de bord.
S’autopeluredebananiser
Dans le même ordre d’idée, le néologisme s’autopeluredebananiser signifie « se nuire à soi-même, provoquer sa propre chute sans aide extérieure ».
Cette image, qui renvoie au gag de la pelure de la banane sous le pied, est probablement une création de l’ancien premier ministre du Québec Jacques Parizeau, qui tentait d’expliquer la tendance de son parti à nuire à sa propre cause.
Du point de vue orthographique, certains préfèrent s’auto-pelure-de-bananiser, plus facile à lire, mais guère plus facile à dire.
L’emploi de ce verbe magnifique est cependant peu répandu, car il représente tout un défi de prononciation. Comme ce mot indique un jugement négatif, il est préférable de ne pas s’enfarger (buter) en le prononçant.