L’orignal, le caribou, le siffleux : les noms québécois des animaux
Les noms de certains animaux que l’on trouve à la fois en Amérique et en Europe varient parfois en fonction du lieu d’origine du locuteur.
1 — L’orignal prend un élan avant de se sauver
Ainsi, lors d’une randonnée en forêt, le marcheur québécois apercevra avec plaisir un orignal, alors que le marcheur français se réjouira de croiser un élan.
Et si l’orignal s’apprête à déguerpir, le Québécois pourrait dire : « regarde l’orignal, il prend son élan ».
Exemple :
— Un orignal, c’est quand même une bête originale. Ce n’est pas donné à tout le monde de se faire pousser des arbres sur la tête.
Même si le mot orignal est un nom canadien-français, sa racine étymologique est européenne. En effet, orignal est issu du mot basque oreinak, pluriel d’orein, qui signifie « cerf » ou « renne ».
2 — Le caribou, la version québécoise du renne
Le caribou canadien est connu sous le nom de renne en Europe.
Le mot caribou est d’origine amérindienne : du micmac kálibu, xalipu ou xalibú, qui signifie « celui qui creuse dans la neige ».
Exemple :
— Je suis allé dans la toundra pour voir des caribous. J’ai surtout vu des nuages opaques de bébittes (insectes).
Un petit caribou
Le caribou est aussi une boisson traditionnelle à base de vin rouge additionné d’alcool et d’épices, à forte teneur d’alcool, consommée surtout durant l’hiver.
Exemple :
— Les chasseurs avaient bu trop de caribou pour être un danger pour les caribous.
3 — Une coquerelle dans mon cocktail
Au Québec, le nom coquerelle désigne la blatte, le cafard.
Exemple :
— Quand on est rentré dans notre nouveau logement, on a découvert que notre petit nid d’amour était plutôt un gros nid de coquerelles. On a dormi à l’hôtel.
Il existe de nombreuses hypothèses pour expliquer l’origine de coquerelle. La plus connue est que le mot coquerelle serait dérivé de l’anglais cockroach ou de l’espagnol cucaracha.
Il est aussi possible que le terme coquerelle ait été adopté pour décrire cet insecte ovale et plat qui rappelle une coque de bateau. Une autre étymologie possible : du latin populaire cocca, « récipient hémisphérique ».
4 — Le siffleux, un système d’alarme naturel
Le mot siffleux sert à désigner la marmotte. Le siffleux doit son nom au cri strident qu’il émet pour alerter ses semblables de la présence d’un prédateur ou d’un danger.
Au Québec, on emploie les deux termes, siffleux et marmotte. Toutefois, l’usage de marmotte est plus courant que son synonyme siffleux.
Exemple :
— Les siffleux ne respectent pas les gens de la haute société. Ils ont creusé leur terrier à côté du 18e trou sur le terrain de golf.
L’habitude des Québécois et Québécoises de créer des noms et des adjectifs se terminant par le suffixe « eux », comme écureux, chevreux, siffleux, proviendrait de leurs ancêtres normands. (Source : Barbaud, Philippe, « Parler d’ici », La Presse Plus, Montréal, 13 avril 1985, p. 16)
5 — Les suisses du Québec
Au Québec, le tamia rayé s’appelle un suisse en raison de la similitude entre ses rayures et celles des uniformes que portent les gardes suisses du Vatican.
Exemple :
— J’ai créé un malaise avec mes collègues français quand je me suis assis calmement à mon bureau après leur avoir raconté que je venais d’écraser un petit suisse avec ma voiture.
6 — Le maringouin, gâcheur de vacances
Au Québec, nous appelons les moustiques maringouins.
Malgré sa sonorité amusante, le mot maringouin est loin d’être un terme affectueux. Au contraire, nous détestons les maringouins et leurs piqûres.
Exemple :
— Le seul bon côté de l’hiver québécois, c’est qu’il n’y a pas de maringouins.
L’origine mystérieuse du mot maringouin
Le mot maringouin n’est pas à proprement parler un québécisme, car il serait originaire d’Amérique du Sud, à l’époque où les explorateurs français sillonnaient les trois Amériques.
Le Dictionnaire de Trévoux (1743), écrit à propos du maringouin : « C’est ainsi qu’on appelle dans les îles d’Amérique une espèce de petit insecte qu’on appelle cousin en France… Les peuples du Brésil appellent en leur langue cet insecte maringouy, d’où est venu le nom maringouin ».
Cet extrait, du Dictionnaire de Trévoux (1743), que l’on trouve dans la publication Les animaux du Canada en 1664, la faune indigène, à la page 38, est accessible en ligne à la Bibliothèque nationale du Québec.
7 — La mouche à feu, la plus belle des mouches
Mouche à feu est l’autre nom que les Québécois et Québécoises donnent à la luciole.
Exemple :
— J’ai entendu une drôle d’expression durant mon voyage en Abitibi : « C’est pas un gros épais (idiot) de même (comme lui) qui a mis la lumière dans le cul des mouches à feu. »
Certains présentent mouche à feu comme un calque de l’anglais firefly. Toutefois, selon Histoire des mots, le terme mouche à feu précède ou apparaît en même temps que son équivalent anglais firefly. Ils ont probablement été créés de façon parallèle au 17e siècle.
8 — La bête puante, un parfum de moufette
La locution bête puante est un le nom imagé donné à la moufette. Bête puante sert aussi à décrire une personne sournoise, et non pas un individu qui dégage de mauvaises odeurs.
En résumé, la moufette doit son nom de bête puante à l’odeur qu’elle dégage, alors que l’humain doit ce surnom à son caractère détestable.
Exemple :
— J’ai écrasé une bête puante (moufette). Mon char (voiture) pue sans bon sens (d’une façon excessive). Il paraît que je dois le laver avec du jus de tomate.
9 — Nos chevreuils ne sont pas des chevreuils
Au Québec, nous utilisons à tort le mot chevreuil pour désigner le cerf de Virginie.
En effet, il n’y a pas de chevreuils au Québec, nous n’avons que des cerfs de Virginie, dont l’aire de répartition s’étend du sud du Canada au nord de l’Amérique du Sud.
— À l’automne, en Beauce, il n’y a plus d’hommes dans les rues. Ils sont tous partis à la chasse au chevreuil.
Pour terminer, nous vous invitons à consulter l’article Quinze expressions animalières du Québec.