Avoir les yeux dans la graisse de bines
L’expression avoir les yeux dans la graisse de bines signifie « avoir le regard altéré par la fatigue, l’alcool, etc. »
Cette expression tirerait son origine des « bines » qui flottent dans la graisse. Pour bien comprendre cette image, il faut savoir que derrière le mot bine se dissimule le mot anglais bean, qui signifie « haricot ». Au fil du temps, les Québécois ont transformé la bean anglaise en bine québécoise. Les bines sont en fait des haricots, aussi appelés « fèves » au Québec et en Acadie.
Exemples :
— Le cuistot, épuisé par le manque de sommeil, avait les yeux dans la graisse de bines devant ses fourneaux.
— Julie me regardait avec les yeux dans la graisse de bines. Un regard vague qui passait à travers moi, comme si je n’existais pas.
— Jules a passé la soirée à boire une bière après l’autre. Vers minuit, il fixait le mur, les yeux dans la graisse de bines.
Les bines, ça ne poussent pas
Dans le film Rock’n Roll de Guillaume Canet, le personnage de Marion Cotillard s’exerce à parler québécois. Elle fait une petite erreur lorsque son personnage dit « on va aller faire pousser des bines ». Au Québec, ce sont les fèves qui poussent dans la nature. Pour avoir des bines, il faut les laisser mijoter longtemps.
En effet, les bines sont un mets traditionnel de haricots cuits avec, entre autres, du lard salé et de la mélasse ou du sirop d’érable. On les retrouve dans nos assiettes, jamais dans la nature.
De plus, les bines, ça vient souvent en canne, une déformation du nom anglais can, qui se traduit par « boîte de conserve ».
Pour découvrir plus en profondeur la gastronomie et le vocabulaire des bines, nous vous invitons à consulter l’article Les fameuses bines québécoises. Vous y apprendrez que donner une bine n’a vraiment rien à voir avec le don d’une fève ou d’un haricot, et qu’une personne peut avoir une belle bine.
Avoir les yeux comme des trous de suce
Les yeux ont inspiré de nombreux poètes à travers l’histoire. Ils ont aussi donné naissance à plusieurs expressions idiomatiques, dont certaines sont propres au Québec.
En plus d’avoir les yeux dans la graisse de bines, les Québécois ont aussi les yeux comme des trous de suce.
Cette expression signifie « avoir les yeux minuscules en raison de la fatigue ».
Précisons que le mot suce est synonyme de « tétine pour bébé ». De nombreux Québécois seront surpris d’apprendre que le nom suce n’a jamais cette signification en Europe.
Être brûlé
Une personne qui a les yeux dans la graisse de bines ou gros comme des trous de suce est brûlée.
En effet, être brûlé signifie « être épuisé, exténué » ou être vanné, comme disent les Français.
Exemples :
— J’ai passé la journée à couper du bois de chauffage. Je suis brûlé.
— Quand je suis brûlé, je vais au spa nordique et je me baigne dans l’eau glaciale. C’est la meilleure façon de se remettre sur le piton (me remet sur pied, me remet d’aplomb, me remonte le moral).
— Les pompiers ont travaillé 24 heures d’affilée. Ils sont brûlés.