Avoir des croûtes à manger
Décryptons l’expression québécoise avoir des croûtes à manger.
L’expression québécoise avoir des croûtes à manger signifie « devoir acquérir encore de l’expérience avant de se prétendre expert dans un domaine, avoir beaucoup de choses à apprendre, avoir du chemin à faire avant d’avoir du succès ».
Exemples :
— J’ai engagé un apprenti à la boulangerie. Ça ne faisait pas deux jours qu’il était là qu’il me disait comment « runner » (diriger) ma cuisine. Eille, le jeune! que je lui ai dit, t’as encore des croûtes à manger avant d’être un vrai boulanger. Il s’est mis à pleurer. Ah! les jeunes…
— Quand on sort de l’université, on s’imagine qu’on est prêt pour les grands projets. Après quelques mois seulement, on réalise à quel point on a des croûtes à manger avant d’être du niveau des meilleurs. C’est à la fois stimulant et déprimant.
— J’ai encore des croûtes à manger avant d’obtenir une étoile Michelin pour mon restaurant. En attendant, je me contente d’acheter des pneus Michelin.
Cette expression imagée est d’emploi courant au Québec. Sa force évocatrice la rend populaire aussi bien à l’oral qu’à l’écrit.
Vert chez nous, bleu chez vous
Au Québec, un débutant est souvent appelé un vert, tandis qu’en France, on utilise plutôt le terme bleu pour désigner une personne inexpérimentée, un novice.
Dans ce contexte, le sens du mot vert a une origine anglaise, probablement liée au fait qu’on associe la couleur verte à la croissance végétale et que les fruits verts ne sont habituellement pas mûrs. Le qualificatif vert a ainsi acquis le sens de « jeune, immature, inexpérimenté ». Cette utilisation remonterait aussi loin que les années 1400 (source en anglais).
En France, dans ce contexte, le mot bleu fait référence aux habits bleus portés par les jeunes recrues militaires.
— Avec la pénurie de main-d’œuvre, l’entreprise de paysagement n’engage plus que des verts. Ça va prendre du temps avant que ces recrues aient le pouce vert.
L’expression avoir le pouce vert, de l’anglais to have a green thumb, signifie « avoir un talent, des aptitudes pour la culture des plantes ». Ailleurs dans la francophonie, on utilise plutôt la locution avoir la main verte.
L’autre sens de vert en France
En France, l’expression être vert, signifie aussi « être très déçu, être écœuré, ressentir un grand sentiment de désespoir ». Un sens inconnu au Québec.
— J’étais vert quand les Bleus ont perdu à la Coupe du monde de football, m’a dit mon cousin français.
Au Québec, comme en France, on dit aussi « être vert de rage », « être vert de jalousie ». Ici, le mot vert sert de superlatif.