Bretter et branler dans le manche
Le verbe québécois bretter signifie « perdre son temps, s’occuper à des riens », « prendre trop de temps pour accomplir une tâche » ou « faire les choses mollement ».
Il arrive parfois que bretter prenne le sens de « faire, fabriquer ».
Exemples :
— Ça fait trois mois qu’on leur a remis notre proposition d’achat. Ils brettent, nous font des promesses, mais rien n’avance.
— On va encore se faire chicaner (gronder) parce qu’on a bretté tout l’après-midi.
— Ça fait trois jours que tu brettes là-dessus. Mais vas-tu finir par aboutir ?
— Si tu cherches Jules, il brette dans le garage.
— Qu’est-ce tu brettes ces temps-ci ? Ça fait longtemps que je n’ai pas eu de tes nouvelles.
Bretter possède de nombreux synonymes québécois comme gosser, niaiser, taponner, téter, zigonner et aussi l’expression branler dans le manche. Eh oui ! Branler dans le manche, qui n’a pas ici de connotation grivoise comme en France.
Un lecteur de Belgique nous a expliqué que cette expression fait aussi allusion au manche d’un outil trop utilisé, qui se déboîte peu à peu, donc être mal assuré, être dans une situation précaire.
Que veut dire branler dans le manche ?
Au Québec, l’expression branler dans le manche signifie « être hésitant, avoir de la difficulté à se décider ».
Exemples :
— Tous les ans, c’est la même histoire. Quand vient le temps de choisir une destination vacances, Jules branle dans le manche. Quand il se décide enfin, il ne reste plus rien de libre. Et après, il est déçu.
— Ils n’arrêtent pas de se plaindre qu’ils veulent du vrai changement, mais ils branlent dans le manche dès qu’on les place dans devant un choix.
Une toune de Mes Aïeux
Mes Aïeux, un groupe de chansonniers (personnes qui interprètent leurs propres chansons) québécois terminent leur toune Le temps des semences avec l’expression branler dans le manche. Et dans ce couplet, il peut y avoir ambiguïté sur le sens : québécois ( hésiter) ou français (masturber) ? Car le mot « graine » en langage familier signifie pénis.
Il est temps que le temps vienne
Que t’arrêtes de regarder ta graine
Il est plus que temps je pense
Que t’arrêtes de branler dans l’manche
Mes Aïeux / Branches, (chanson Le temps des semences)
Mais qu’est-ce qu’une toune ?
Une toune est une chanson, un air, une rengaine, une mélodie. Ce mot est une déformation du mot anglais tune, francisé et écrit de façon phonétique.
Exemples :
— Je n’écoute plus la radio. C’est toujours les mêmes tounes qui passent.
— Ma blonde (copine) chante la même toune à longueur de journée. Ça m’énerve !
— J’ai suivi des cours de guitare pendant cinq ans, mais je ne suis pas très bon. Je sais jouer que trois ou quatre tounes de façon potable.
Nous employons parfois toune dans l’expression il faudrait que tu changes de toune. On s’en sert pour dire à quelqu’un que nous sommes « tannés » de l’entendre radoter. C’est une invitation à changer, à passer à autre chose. (Être tanné signifie « en avoir assez, en avoir marre ».)
— Je ne suis plus capable (je n’en peux plus) d’entendre Jules se plaindre. Il faudrait qu’il change de toune.
— Il va falloir que tu changes de toune parce que là, je ne te crois plus.
Un bretteux
Un bretteux est une personne indécise, quelqu’un qui tergiverse ou qui agit avec lenteur, un glandeur. On l’appelle aussi « un branleux » au Québec. C’est celui qui perd son temps ou le fait perdre aux autres.
Exemples :
— On est dirigé par une gang (bande) de bretteux. Pas surprenant que rien n’avance.
— On a un nouveau patron qui n’a pas peur de prendre des risques. Ça change du bretteux qu’on avait avant.
— Jules possède énormément de connaissances, mais quel bretteux ! Il n’arrivera jamais à rien.
La brette en Belgique
En Belgique, on entend l’expression avoir une brette avec quelqu’un, c’est-à-dire avoir une querelle, une dispute avec cette personne.
Saviez-vous que dans son sens vieilli en Europe, le verbe bretter signifie « combattre à l’épée, chercher querelle », et le substantif brette désigne une épée longue et étroite ?