Attention : elle a son voyage !
Avouons-le, l’expression québécoise avoir son voyage est difficile à déduire pour les non-Québécois. Pour les aider à la comprendre, nous pourrions leur dire qu’elle est synonyme d’en avoir plein son casque… ou si vous préférez en avoir assez, être à bout de nerfs, en avoir sa claque, en avoir marre.
On peut donc avoir son voyage durant toute l’année, et pas seulement durant le temps des vacances.
Exemples :
— J’ai passé seize heures à attendre à l’aéroport. Je commençais sérieusement à avoir mon voyage.
— La prochaine fois que le patron me critiquera, je te jure que je démissionne. J’ai mon maudit voyage de cette job-là ! Je n’aurais jamais imaginé qu’être conseiller en voyages pouvait être si stressant.
— Je commence à avoir mon voyage de ma vieille auto. Impossible de partir en vacances, elle tombe en panne chaque semaine.
J’ai mon voyage : un avertissement
L’expression j’ai mon voyage peut aussi servir d’avertissement. C’est une façon de dire qu’on a atteint les limites de sa patience, qu’on risque d’exploser à tout moment.
Exemples :
— Là, je commence à avoir mon voyage de toutes tes bêtises, ton manque de respect et ta négligence.
— Tu n’as pas encore compris! Ça fait longtemps que j’ai mon voyage. Un jour, tu vas rentrer et la maison sera vide.
J’ai mon voyage : l’étonnement
Dans certains contextes, j’ai mon voyage exprime aussi l’étonnement, la surprise ou l’incrédulité.
Exemples :
— Quoi ! C’est Jules qui a obtenu la promotion ? Le Jules qui porte des pantalons trop courts et des chemises hawaïennes ? Ben, j’ai mon voyage !
— La belle Julie a accepté de marier Jules ! Le Jules qui porte toujours des pantalons trop courts et des chemises hawaïennes ? Ben, j’ai mon voyage !
Au Québec, lorsqu’on marie quelqu’un, c’est qu’on l’épouse, et lorsqu’on marie deux personnes, c’est qu’on les unit par un acte de mariage.
Un autre sens au mot voyage
Au Québec, le mot voyage désigne aussi le contenu d’un véhicule, une cargaison.
Exemples :
— Nous avons fait venir six voyages de terre pour l’aménagement du terrain. On en aurait eu assez de trois. Là, je donne de la terre à tous mes voisins.
— Je vais être de retour dans trois heures. Il me reste un voyage de patates (pommes de terre) à livrer à Montréal.
Faire un voyage de paresseux
L’expression faire un voyage de paresseux décrit l’action de se surcharger, au risque de tout échapper, afin d’éviter de revenir une deuxième fois. Par exemple, transporter quatre sacs d’épicerie en une seule fois plutôt que de faire deux allers-retours.
Exemples :
— Les déménageurs m’inquiétaient. Ils faisaient des voyages de paresseux jusqu’à ce qu’ils échappent (laissent tomber) ma télévision dans les marches (escaliers).
— Ma voisine avait les mains pleines et tenait la sangle de son sac à main dans sa bouche. J’ignore pourquoi elle s’entête à faire des voyages de paresseuse. C’est tellement plus de trouble (ennuis, difficultés, problèmes) !
En avoir plein son casque ou avoir son voyage ?
L’expression en avoir plein son casque est synonyme « d’avoir son voyage », c’est-à-dire « ne plus être capable de supporter quelque chose, en avoir assez ».
Exemples :
— Jules, j’en ai plein mon casque de tes idioties. Je ne peux pas croire que tu puisses être aussi épais (stupide).
Habituellement, quand nous en avons plein notre casque, nous hésitons moins à parler dans le casque à quelqu’un. Cette expression signifie « parler de façon agressive à une personne parce qu’on est mécontent de ses actes ou de ses paroles ».
— Je n’aurais peut-être pas dû, mais je lui ai parlé dans le casque. Il est parti sans dire un mot. Ça m’a fait un bien terrible, je dois l’avouer.
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